Les visites sur les sites internet d’hôtels à partir des smartphones (qui n’incluent pas celles à partir des tablettes) représentent désormais, dans la plupart des cas, plus de 50% du total. En revanche, les réservations effectuées à partir des dispositifs en question, bien qu’elles soient en forte augmentation, n’ont « seulement » frôlé en 2017 que 20% du total, atteignant 30% sur quelques destinations ou hôtels, et même pas 10% sur d’autres.
Dit autrement, la conversion du trafic sur téléphone portable est de 2 à 5 ou même 6 fois inférieure à celle du PC. Une donnée qui coïncide avec une récente analyse de Fastbooking. Criteo l’analyse également dans une étude récente et aboutit aux mêmes conclusions.
– Pourquoi cette différence ?
– Pourquoi les nombreuses visites depuis les téléphones portables n’aboutissent pas à une réservation ?
– Existe-t-il un transfert des utilisateurs depuis les smartphones vers les PC/tablettes pour réserver ?
– Pourquoi certains hôtels obtiennent un poids plus important de ventes sur mobile que d’autres à partir des téléphones portables ?
– Pourquoi les OTA ont-elles une meilleure conversion sur les téléphones portables que les sites internet des hôtels ?
Il existe des études comme celle de MobileMarketer ou cette autre de TravelWeekly, ou cette autre pour les hôtels de luxe, qui analysent ces différences.
Vu qu’un grand nombre de nos clients nous interrogent sur ce sujet, chez Mirai, nous avons également étudié cet aspect d’un point de vue commercial et empirique en analysant les réservations sur tous nos clients en France en 2017. Voici nos conclusions.
Le téléphone portable, principal outil utilisé pour la consultation
La première explication est à la fois la plus simple et la plus radicale dans l’utilisation que nous donnons au téléphone portable. Il est devenu un outil de consultation permanente qui répond instantanément à ce que nous recherchons. Qui n’a jamais demandé à Google (ou à Siri) : « Quand l’homme a-t-il marché sur la Lune ? » ou « Quel est l’âge à Mick Jagger?”. Nous devenons dépendants à l’immédiateté et à la consultation permanente.
Pour consulter les prix également, comparer des hôtels et collecter l’information sur les éventuels voyages futurs. Nous profitons de nos moments libres, du trajet vers notre lieu de travail ou en jouant sur notre téléphone devant la télé, pour faire nos recherches.
Nous nous trouvons dans ce que le monde du marketing appelle « up in the funnel » ou, en d’autres termes, la toute première partie du processus. Nous récoltons de l’information. Dans la plupart des cas, nous sommes encore loin de prendre une décision et encore plus de passer à l’action (achat ou réservation). Cela se reflète dans la différence de temps passé sur les sites internet en fonction du dispositif. Lorsque vous recherchez ou vous amusez, vous passez peu de temps. Lorsque vous achetez, vous passez plus de temps. Vous vous renseignez sur tout un tas de détails. Un exemple de site internet au trafic intense.
Différentes études confirment que l’usage du téléphone portable est majoritaire dans cette étape initiale « up in the funnel » (en comparaison avec le PC ou la tablette) et pas seulement dans l’industrie travel mais dans tous les domaines. C’est un modèle qui vaut pour tout le monde.
La majorité de ces recherches préliminaires n’aboutissent à rien. Des milliers de consultations qui ne se convertiront jamais, ou qui le feront mais peut-être plus tard, ce qui rend plus difficile la traçabilité de ces visites. Vous-mêmes, pensez à votre comportement sur mobile: combien de pages d’hôtels, de sites d’informations touristiques ou de restaurants avez-vous sauvegardé dans vos “favoris” sur mobile en pensant à votre prochaines escapade ou aux vacances d’été…et à combien réellement vous êtes-vous réellement rendus. Moins de 10% probablement…
Cette différence dans l’usage des dispositifs (téléphone portable/tablette/PC) dans les différentes étapes du funnel, justifie en partie la grande différence entre visites et réservations (c’est-à-dire, le taux de conversion) de chaque dispositif. La quantifier est cependant complexe et pourrait varier énormément d’une destination à l’autre ou d’hôtel à l’autre.
Le téléphone portable, outil de transmission pour localiser et appeler l’hôtel
Qui n’utilise pas son téléphone portable pour rechercher l’adresse d’un hôtel ? Ou pour trouver son numéro et l’appeler ? Sur cet aspect, le mobile emporte tout sur son passage.
Tout ce trafic, qui est essentiel pour l’hôtel, n’enregistre aucune conversion en ligne (réservation en ligne/visite) sur le site internet. Nous devrions donc ajouter d’autres objectifs de conversion au trafic sur les téléphones portables. Appels à l’hôtel effectués depuis le site internet ? Consultations qui mènent directement à l’emplacement géographique ou à l’adresse ? Difficile à savoir et encore plus à quantifier, mais sans prendre ces éléments en considération, la contribution du téléphone portable à votre business en devient invisible.
Et pour réserver, smartphone ou PC/tablette ? Cela dépend
Après analyse de toutes les réservations de 2017 (des dizaines de milliers), les conclusions obtenues nous démontrent des similitudes mais aussi d’importantes différences entre les utilisateurs de téléphones portables et de PC. Comprendre ces différences nous aide à expliquer de manière plus empirique « pourquoi certains hôtels convertissent plus à l’aide des téléphone portables que d’autres » ou, ce qui revient au même « pourquoi ma conversion sur mobile est X ou Y ».
Utilisateurs de téléphones portables et de PC …. de plus en plus semblables
L’année 2017 confirme la tendance selon laquelle les utilisateurs qui réservent via leur mobile ressemblent de plus en plus aux utilisateurs de PC. Cela se reflète dans la convergence graduelle des variables anticipation moyenne (ABW, average booking window), durée moyenne du séjour (LoS, length of stay) et valeur moyenne de réservation (ABV, average booking value).
A souligner le fait que la différence de panier moyen ne diminue pas au même rythme que celle du séjour moyen. La raison se trouve dans l’autre partie de la variable : le prix (ADR) qui continue toujours à varier beaucoup suivant qu’il s’agisse de clients mobile ou desktop, comme nous le verrons plus loin.
Utilisateurs semblables, oui… mais différents à la fois
Si nous approfondissons un peu les données, nous notons de grandes différences dans le modèle de comportement entre utilisateurs de téléphones portables et de PC.
En croisant la donnée d’anticipation avec celle du séjour, nous obtenons la matrice suivante de poids des réservations via les téléphones portables par rapport au total.
Pourcentage de réservations à partir de smartphones (par rapport aux PC/tablettes) :
Un comportement très différent aux deux extrêmes.
- Peu d’anticipation et un séjour court impliquent un usage élevé du smartphone pour réserver. Il enregistre plus de 40% des réservations pour une nuit et pour le même jour. Nous parlons de données moyennes. Dans certains hôtels, nous avons comptabilisé des pics jusqu’à 60% de la vente effectuée à partir de smartphones.
- Une grande anticipation et des séjours longs impliquent un usage réduit du smartphone pour réserver. Seulement 6% des réservations pour cinq nuits avec plus de 60 jours d’anticipation sont réalisées à partir d’un téléphone portable. Nous parlons d’une différence de 7x.
Prix (ADR, average daily rate)
Parmi les grandes différences de comportement, on trouve également le prix moyen réservé. Pour un tarif plus bas, l’usage du téléphone portable est supérieur. À mesure que le tarif augmente, l’usage du téléphone portable diminue au détriment du PC qui augmente.
Deux explications à ce comportement sont possibles :
- Les utilisateurs plus jeunes (les natifs numériques) ont tendance à réserver des tarifs moins chers que les utilisateurs plus âgés (pouvoir d’achat).
- Dépenser beaucoup d’argent demande plus de tranquillité. Dépenser 80 euros ou 2000 euros dans une réservation est encore très différent dans les esprits d’un bon nombre d’utilisateurs qui, une nouvelle fois, préfèrent attendre et réserver en toute tranquillité depuis leur domicile ou depuis leur bureau.
Marché émetteur
Enfin, une autre variable qui pourrait conditionner l’usage du téléphone portable est le marché émetteur. Les résultats obtenus sont corrélés avec l’anticipation moyenne. À savoir que le marché d’origine du client a tendance à indiquer une anticipation déterminée (planification de vols, publication de calendriers scolaires, etc.). Et comme nous l’avons vu, l’anticipation a une incidence directe sur l’usage du téléphone portable.
Les données nous confirment que les marchés avec une anticipation supérieure sont ceux qui ont le moins de volume de réservations à partir du téléphone portable, alors que les marchés les plus proches, dont l’anticipation moyenne est inférieure ont, au contraire, un volume supérieur de réservations à partir du mobile.
Concernant les marchés émetteurs clés pour la destination France, nous voyons que :
- La France se situe dans notre étude au-dessus de la moyenne dans le poids des réservations mobiles, du fait probablement, qu’étant le marché local, l’anticipation est moins nécessaire dans la planification du voyage et à un poids plus important du segment corporate.
- l’Espagne, l’Italie, l’Irlande et le Royaume-Uni, se situent au-dessus de la moyenne dans notre étude. Le profil du client (âge) ou les habitudes d’utilisation du téléphone portable pourraient justifier ces écarts à la hausse. Ces pays figurent parmi les leaders européens en matière de consommation de téléphone portable.
- Les Pays-Bas, la Suisse et la Belgique se situent au niveau de la moyenne.
- Les États-Unis, bien qu’étant un marché très développé en matière de téléphonie mobile, se situent très en-dessous de la moyenne. Mais les marchés transocéaniques sont très pénalisés puisque la réservation hôtelière est précédée de l’achat d’un billet d’avion long-courrier et d’un tarif très supérieur aux tarifs classiques low-cost européens. L’Allemagne se situe également en dessous de la moyenne, faisant une fois de plus exception sur ce marché de la vente en ligne, où elle est à la traîne:
Dans notre étude, nous n’incluons pas (faute de données nécessaires) une variable très importante qui est l’âge des clients. Si nous avions cette donnée, nous supposons que nous noterions une corrélation évidente entre l’âge et l’usage du téléphone portable.
Pourquoi les OTA font-elles plus de vente à partir des téléphones portables que les sites internet d’hôtels ?
Dans un premier temps, nous devons expliquer la nomenclature. Les OTA parlent habituellement de vente « mobile » en incluant les smartphones et les tablettes, comme dans l’étude de Criteo mentionnée précédemment.
C’est pourquoi, il est important de les comparer sur un pied d’égalité. Les données que nous avons transmises dans cette étude excluent les tablettes puisque nous considérons que ces dispositifs s’apparentent plus aux utilisateurs de PC que de téléphone portable.
Malgré tout, selon plusieurs études, citons à nouveau l’étude la plus récente de Criteo, on note une grande différence dans le pourcentage des réservations effectuées depuis les smartphones entre les OTA et les hôtels.
Nos données sont de beaucoup supérieures à celles exposées ici. Le poids du smartphone en 2017 a été de presque 20%. Sur les destinations plus urbaines, ce pourcentage a atteint 28% et 36% sur les hôtels en particulier.
Il est certain que la conversion des OTA sur les téléphones portables est supérieure à celle des sites internet des hôtels, mais elle l’est au même titre sur les PC. En voici les raisons :
- Elles proposent des destinations sur le monde entier, alors que votre site internet n’en propose qu’une seule (ou quelques-unes, dans le cas d’une chaîne).
- Elles proposent tous les hôtels du monde (ou un grand nombre), alors que votre site internet n’en propose qu’un seul (ou quelques-uns, dans le cas d’une chaîne).
- Image de marque enracinée. Une plus grande sécurité pour effectuer la réservation, en particulier sur les téléphones portables où tout est plus difficile et moins pratique.
- Une plus grande fidélisation. En l’absence de stratégies de fidélisation de la part de l’hôtel, les OTA occupent le créneau en créant des utilisateurs fidèles à une marque ou à une appli.
- Meilleure identification de l’utilisateur et remplissage automatique des données.
Mais il y a, en outre, trois raisons de plus concernant les portables :
- Comparer plusieurs sites internet sur un smartphone est beaucoup plus complexe que sur un PC. Il est plus difficile pour un client qui choisit un hôtel OTA ou TripAdvisor, de basculer sur le site internet de l’hôtel. Cela aboutit au fait que le client reste sur l’OTA pour réserver.
- Facilité des moyens de paiement, en particulier sur les modèles merchant où ce sont les OTA qui encaissent.
- Des applis puissantes qui rendent leurs utilisateurs plus captifs.
Conclusions
Les utilisateurs n’ont pas recours au téléphone portable de la même manière qu’au PC. Ce sont des étapes différentes du voyage du client (customer jorney). En outre, les utilisateurs sont multi-dispositifs et passent constamment de l’un à l’autre.
Reste à espérer que des entreprises comme Google ou Facebook intègrent la traçabilité d’utilisateurs multi-dispositifs. Il n’y a qu’à regarder les milliers de résultats de recherche de type « cross device tracking and attribution » sur Google. Cela nous permettrait une meilleure compréhension de ces différences de conversion entre téléphone portable et PC. Nous verrions avec plus de certitude que le téléphone portable est l’élément essentiel dans le funnel et que, par conséquent, sa conversion assistée serait beaucoup plus élevée que celle du modèle last-click.
Dites-moi quel est votre type de client et je vous dirai quelle est votre part de vente sur dispositif mobile. Il faut analyser les variables qui ont une incidence sur la réservation à partir d’un smartphone : marché émetteur, anticipation, séjour moyen, prix moyen et, même si nous ne l’avons pas analysé dans cette étude, l’âge moyen de votre client. Ces données expliqueraient immédiatement pourquoi le poids de votre téléphone portable est tel qu’il est.