Nous abordons dans ce post un sujet bien connu de tous mais non résolu pour autant, ni même en voie de résolution. Les disparités sont le problème majeur d’un très grand nombre d’hôtels, et remédier à cette situation est fondamental pour commencer à élaborer une bonne stratégie de vente directe.
Qu’est-ce qu’une disparité des prix ?
Il s’agit du fait de trouver sur internet pour votre hôtel un tarif à la baisse et que vous n’avez pas autorisé. Cela peut-être un markup non appliqué correctement ou un tarif PVP duquel les OTAs réduisent une partie de leur commission.
Les disparités me portent-elles préjudice ?
Non dans le cas où cela ne vous intéresse pas de savoir à quel tarif final votre hôtel se vend, quel type de client séjourne chez vous, ou que votre site internet ou Booking.com vendent tout ce qu’ils pourraient vendre.
Oui, dans le cas contraire. Voici les raisons :
- Traitement inégal. Les disparités profitent aux canaux de paiement à crédit et portent préjudice aux canaux de paiement direct, ce qui finit par vous pénaliser.
- Apportent des clients qui ne sont pas la cible qui vous intéresse. Un client à 100 EUR n’est pas le même qu’un client à 85 EUR.
- Transmettent une image de perte de contrôle des prix et de confusion
- Empêchent la création d’un programme de fidélisation puisque vous ne proposez pas le meilleur tarif.
- Vous fait croire que certains canaux apportent de la valeur (parce qu’ils génèrent des réservations) alors qu’il n’en est rien en réalité puisque la majorité de ce qu’ils vendent provient de disparités.
- Déforment votre travail de revenue management puisque vous faites fluctuer les tarifs sans connaître avec certitude quelle part de ce changement arrive réellement au client.
- Impacte très négativement votre vente directe : pourquoi les clients réserveraient-ils sur votre site internet s’il existe des options plus économiques et faciles à trouver ?
- Conduit en général à une rentabilité inférieure de votre hôtel puisque les canaux qui vous apportent la rentabilité la plus faible sont à la fois ceux qui se font le plus de marge en créant les disparités. C’est pourquoi, ce sont les canaux qui vous intéressent le moins qui vendront plus au lieu des autres (comme le canal direct).
- Affecte la rentabilité de vos investissements en marketing digital, notamment sur les comparateurs de prix: le client risque de cliquer sur le lien de votre site web par “curiosité” mais de terminer sa réservation sur le canal qui apparaîtra le moins cher. Cela vous aura coûté un clic et ne vous rapportera aucune réservation.
- Impacte négativement vos relations avec les OTAs qui respectent les règles du jeu (et elles sont peu nombreuses)
Les disparités sont-elles légales ?
A priori, non. En France, depuis la loi “Macron” d’Août 2015, la relation entre les hôtels et les OTAs doit passer par un contrat de mandat. Cela veut donc dire que l’hôtel est le seul pouvoir fixer le prix de vente de son hôtel.
Cela suppose également qu’aucune plateforme de vente en ligne ne devrait être en mesure de vous vendre si vous n’avez pas de contrat avec elle….La réalité est bien différente…notamment du fait des affiliés des OTAS.
Si vous avez signé des contrats avec vos distributeurs, qu’ils ont accepté le prix fixé, mais qu’ils ne le respectent pas, il s’agit ni plus ni moins que d’une rupture de contrat. Légal ou pas, le contrat que vous avez signé n’a aucune valeur.
Aucune loi n’oblige à travailler avec tous les distributeurs du marché. Vous avez la liberté de choisir les canaux avec lesquels vous souhaitez travailler. Ne gardez seulement et exclusivement que ceux qui respectent les règles et abandonnez les autres.
Quand les disparités se produisent-elles ?
Contrairement à ce que certains pensent :
· Cela n’a rien à voir avec le fait d’avoir des contrats qui mentionnent des tarifs nets. Les disparités existent sur les tarifs nets mais aussi sur les tarifs BAR (best available rate) où l’hôtel fixe le PVP et paie une commission sur chaque réservation.
· Vous n’évitez pas non plus les disparités en ayant tous les canaux connectés au channel manager.
Les disparités ont lieu lorsqu’il existe un paiement à crédit, c’est-à-dire, quand il n’y a PAS de paiement direct du client final à l’hôtel.
En ne contrôlant pas le paiement, vous n’avez aucun moyen de connaître avec certitude le prix que le client final a payé au niveau du dernier maillon de la chaîne, qui est en général une OTA avec laquelle vous n’avez pas de contrat. Vous n’avez en outre aucune idée des paiements successifs qui ont eu lieu avant d’arriver jusqu’à vous. Vous savez seulement que vous avez touché le tarif net stipulé dans le contrat ou le BAR moins la commission fixée.
Quels canaux créent les disparités ?
Les seuls canaux qui ne font PAS de disparités sont ceux qui travaillent au moyen du paiement direct du client à l’hôtel. Parmi les OTA qui ont un volume de ventes conséquent, seules Booking.com et Expedia en font partie dans leur modalité de paiement direct (« hotel collect »).
Le reste des canaux peut créer des disparités, c’est pourquoi, vous devez les vérifier en permanence.
Pourquoi certains OTA/grossistes créent-ils des disparités?
À aujourd’hui, presque tous les canaux en ligne rivalisent pour les mêmes clients. Différentes études récentes montrent que le client compare jusqu’à 25 sites internet avant d’effectuer un achat.
La triste réalité est que la majorité des OTA/grossistes ne peut pas faire grand-chose en matière de parité des prix contre Booking.com (leader indiscutable) ou le propre site internet de l’hôtel.
Ces OTA et grossistes se trouvent face au dilemme de vendre peu ou de « jouer des disparités ». En chiffres, cela reviendrait à passer de la vente d’1 nuitée et gagner 20 EUR de marge à, avec une baisse de prix préalable de 8 EUR, vendre 5 nuitées et gagner 12 EUR sur chacune d’elle. Au total nous parlons de gagner 60 EUR au lieu de 20 EUR. Du commerce pas très “carré” mais du commerce finalement.
Rappelons-nous que la première chose que tout distributeur doit faire est de couvrir ses frais fixes. Et pour cela il a besoin d’un volume pour diluer ses frais fixes parmi un grand nombre de nuitées. Dans un premier temps « ne pas perdre » et ensuite « gagner quelque chose ». Cependant, le second cas “gagner quelque chose” peut se faire au moyen de rabais ou représenter une force de négociation plus forte pour l’année suivante. Lorsqu’un canal arrive à cette situation extrême, nous savons déjà comment il finira à court terme. Nous avons vu de nombreuses faillites fracassantes ces dernières années.
Avoir des tarifs par marché chez les tour-opérateurs est-il lié ?
Sans aucun doute. Si vous proposez toujours des tarifs par marché, il est fort probable que vous ayez un sérieux problème de disparités. Il y a deux raisons :
· Le canal au meilleur prix (limité à un marché en théorie) peut le distribuer facilement sur internet (quelles sont les frontières d’internet ?) à tout autre marché.
· Le reste des OTA et des grossistes, face au fait de ne pas disposer du meilleur tarif sur certains marchés, s’inquiéteront de réduire de leur côté pour tenter d’être compétitives.
Est-ce quelque chose de nouveau ou cela a- t-il toujours existé ?
Avant l’arrivée d’internet, l’hôtel contrôlait à peine le PVP au moyen de contrats de distribution puisque le paiement direct était un choix minoritaire. Chaque tour-opérateur/agence le fixait selon ses critères et, parfois, en fonction du marché émetteur. Cela n’est pas dramatique dans le monde offline puisque les clients y sont plus captifs et que pour accéder à des tarifs différents, ils doivent en plus se déplacer physiquement, quelque chose d’improbable à grande échelle.
Mais il existe en revanche un problème avec l’arrivée d’internet puisqu’en quelques minutes votre client peut avoir accès à différents tarifs pour votre hôtel que vous ne contrôlez pas et n’autorisez pas (dans le monde en ligne tout au moins).
Cela a été encore renforcé avec la montée en puissance des comparateurs de prix; les canaux entrant encore plus en concurrence les uns face aux autres puisqu’ils y sont présentés côte à côte et que le client a toute facilité pour découvrir rapidement le meilleur tarif.
Les acomptes que certains canaux me versent changent-ils quelque chose ?
Cela n’a pas d’impact directement mais ils placement l’hôtelier dans une situation de subordination et d’impression de dette envers l’intermédiaire. Cette relation déséquilibrée n’est pas propice au fait de pouvoir ensuite demander à l’intermédiaire un respect strict des conditions de parité.
Qu’ont à voir les « affiliés » dans tout cela ?
Les grossistes ne sont pas à la base des canaux B2C mais B2B, c’est pourquoi ils redistribuent en fait vos chambres à d’autres canaux qui sont en général des B2C (OTA ou agences physiques). Les OTA comme Booking.com ou Expedia ont également leur réseau d’affiliation auquel elles redistribuent dans le monde online vos chambres et tarifs.
Pour compliquer un peu plus les choses, il n’y a pas toujours deux niveaux dans la chaîne mais parfois beaucoup plus. Une vente peut s’effectuer selon le schéma B2B2B2B2C, où le canal avec lequel vous avez un contrat vend la chambre à un autre grossiste, lequel le vend à son tour à une agence réceptive, qui la vend à une OTA (parmi les milliers qui existent), cette dernière la vend finalement au client final. Dans une chaîne de 4 à 5 maillons, contrôler les paiements et les quantités s’avère tout simplement impossible.
Sans aucun doute, les réseaux d’affiliés sont, de par leur opacité, un des points noirs majeurs dans le monde des disparités.
À qui reprocher les disparités? À celui qui les crée (affilié) ou à celui qui les permet (le canal avec lequel vous avez un contrat) ?
Il est très courant que le canal avec lequel vous avez un contrat rejette la faute sur l’affilié qui lui a généré la vente. Il a en partie raison (eux non plus ne peuvent pas connaître le prix que le client a payé) mais en réalité il est de sa responsabilité de contrôler ses affiliés, il n’a donc pas d’excuse. S’il ne peut pas les contrôler, il lui appartient de leur fermer les ventes, un point c’est tout. Il n’y a rien à ajouter.
C’est pourquoi, le fait qu’un canal vous génère systématiquement des disparités au moyen de l’affiliation est entièrement la faute du canal avec lequel vous avez le contrat.
Pour aller plus loin, et notamment dans le cadre de la loi Macron, le canal est lequel vous avez un contrat devrait se voir dans l’obligation de vous demander votre autorisation pour chaque affilié avec lequel il travaille, sachant qu’il est désormais obligatoire que chaque plateforme de réservation online ait un contrat de mandat avec l’hôtel…..Théorie, encore, car, aucun aujourd’hui ne le fait.
Quels types de disparités existe-t-il ?
L’intermédiation est certainement très innovante sur ce point et utilise chaque fois des moyens plus complexes pour créer des disparités. Nous les analysons dans notre prochaine post.
Comment contrôler les disparités de mon hôtel ? Lorsque j’y parviens, à quels résultats dois-je m’attendre ?
Cela requiert la mise en place d’un process interne, de la constance et de la détermination. Nous analysons les éléments-clés ainsi que leurs résultats dans cet autre article.
Comment contrôler les disparités de mon hôtel ? Lorsque j’y parviens, à quels résultats dois-je m’attendre ?
Cela requiert la mise en place d’un process interne, de la constance et de la détermination. Nous analysons les éléments-clés ainsi que leurs résultats dans cet autre post.
Conclusion
Dans la distribution online, contrôler le prix de vos chambres est un élément vital et la première étape à passer si vous souhaitez développer votre canal direct. C’est le premier examen à réussir. Sans cela, tout ce que vous ferez derrière (investissements marketing, chatbots ou réseaux sociaux) aura un effet bien moindre. C’est comme vouloir obtenir son bac sans avoir être passé par l’école primaire.
Certains hôtels ont compris cette réalité et se sont mis au travail avec de bons résultats. En revanche, pour beaucoup, d’autres, la majorité, l’intermédiation continue de fixer les prix en totale impunité et de maintenir des niveaux de vente artificiels qui vous font croire qu’ils vous apportent encore de la valeur lorsque ce n’est plus le cas. Il vous appartient de vous retrousser les manches et d’y remédier ou bien de l’accepter mais au moins ce sera en connaissance de cause.